Message de solidarité avec les camarades résistant à la spoliation des Jardins ouvriers d’Aubervilliers au profit de la piscine d’entraînement pour les JO Paris 2024

Les amis japonais nous ont fait parvenir un très beau message de solidarité à une semaine des Jeux Olympiques de Tokyo.

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Nous tenons à exprimer notre solidarité avec les camarades qui occupent les «Jardins à défendre» depuis Tokyo, la capitale du Japon qui vit de nouveau sous l’état d’urgence face à la recrudescence de la pandémie. Nous avons appris que ces Jardins servent depuis les années 1930 d’un potager ouvrier, indispensable bien commun pour la nutrition de la classe populaire à Aubervilliers, mais aussi pour la protection de l’environnement dans le quartier.

La spoliation de cet héritage collectif précieux n’est rien d’autre qu’un de ces «désastres olympiques» que connaissent toutes les villes d’accueil des Jeux Olympiques et que nous dénonçons au même titre que l’expulsion de nombreuses personnes des parcs publics et de l’HLM municipale au sein de Tokyo pour la construction d’un nouveau stade national. Nous sommes indignés d’apprendre que les autorités vous imposent un ultimatum pour le retrait du terrain avant le 16 juillet. Aujourd’hui vous êtres donc menacés par une évacuation de manu militari et nous saluons votre détermination à affronter cette violence administrative et policière. Ainsi l’olympisme se démasque en France comme au Japon.

A une semaine de l’ouverture des Jeux en pleine progression de la pandémie, à Tokyo, nous tenons aujourd’hui un rassemblement à Tsukiji, un ancien marché aux poissons, pour dénoncer la visite de Thomas Bach, le président du Comité olympique international à Hirosima, ainsi que celle de John Coates, un de ses vice-présidents, à Nagasaki. En faisant un saut aux villes incarnant la cause séculaire de l’abolition de toutes les armes nucléaires dans le monde, ils veulent redorer le blason du COI dont l’autorité symbolique et morale s’est irrémédiablement effondrée auprès du peuple japonais. Il s’agit d’une appropriation inacceptable d’une noble cause et d’un sacrilège de la mémoire des victimes des bombardements atomiques. On ne les pardonnera jamais de leur arrogance et comportement irrespectueux.

Ce marché de Tsukiji, qui existait de 1935 à 2018 comme une institution bien ancrée dans la vie locale et quotidienne du peuple, tenait pour ainsi dire un rôle analogue du potager à Aubervilliers. C’était «un marché aux poissons à défendre», mais il a fini par être démantelé, déplacé et sacrifié, malgré une contestation très importante, à la préparation des Jeux. Le terrain a été transformé en un gigantesque parking pour les véhicules mobilisés pour l’organisation de l’événement. C’est la même logique de la destruction du bien commun qui est à l’œuvre, et on a là une preuve de plus de la nocivité indéniable de l’olympisme pour la vie et la culture du peuple.

A Tokyo comme dans tout le reste du Japon, l’opposition à la tenue des Jeux reste assez importante, mais il faut bien dire qu’elle est essentiellement motivée par la peur de la recrudescence de la pandémie. Il est pourtant bien clair aux yeux de celles et ceux qui luttent depuis longtemps pour la défense du potager, du marché aux poissons, de la santé publique, du logement, de l’environnement, des droits de l’homme et de la paix que, même avant la pandémie, la propagande mise en œuvre par les organisateurs japonais sur les mérites supposés des JO pour le recouvrement des régions, comme Fukushima, dévastées par le tremblement de terre en mars 2011 n’est pas moins démagogique et mensongère que la main basse sur la cause de Hiroshima et de Nagasaki par les seigneurs des cinq anneaux. La pandémie ne fait que dévoiler la nature foncièrement corrompue de leur entreprise et le mécanisme de leur pillage et exploitation.

L’olympisme dépend entièrement des deux systèmes dominants que sont le nationalisme et le capitalisme. C’est pourquoi les dominateurs ne sauraient arrêter la machine olympique. Seul le peuple prêt à défier ces deux systèmes pourra l’arrêter un jour et la faire disparaître de la planète. Paris est une de ces premières villes qui ont vu leurs habitants oser relever ce défi. Nous allons suivre ce chemin en solidarité avec les camarades à Aubervilliers et partout ailleurs dans le monde.

Non à la spoliation par l’olympisme des Jardins ouvriers d’Aubervilliers !

No Olympics anywhere !

16 juillet 2021, à Tokyo

Éteignons la flamme olympique ! Une déclaration commune des anti-olympiques transnationaux

Le 25 mars 2021, le relais de la flamme olympique part du J-Village à Fukushima, là où le séisme de la côte pacifique du Japon a frappé et où la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi a été détruite il y a dix ans. Le Japon est toujours confronté à la pandémie et, selon tous les sondages récents, 80 % de la population s’oppose aux Jeux par crainte qu’ils soient un « vecteur géant de la propagation du virus ». Dans ce climat, le comité d’organisation des Jeux olympiques de Tokyo 2020 a annoncé l’interdiction des spectateurs étrangers, excepté la famille olympique et les « amis des partenaires olympiques », mais n’a pas encore décidé l’annulation des Jeux. 

 

Le relais de la flamme olympique, inventé par Carl Diem et Joseph Goebbels pour les Jeux Olympiques (JO) 1936 de Berlin, est présenté comme un signe « d’espoir » pour « surmonter » cette période incertaine. Outre le relais de la flamme, Fukushima doit organiser des matchs de baseball et de softball pour les JO de Tokyo 2020. Alors que les JO de Tokyo 2020 sont présentés comme des « Jeux de la reconstruction », ils n’ont rien à voir avec la « reconstruction » et ce depuis leur origine : la candidature est un programme politique nationaliste du gouverneur d’extrême droite de Tokyo depuis 2006 (Tokyo a perdu sa candidature pour les Jeux de 2016). Après les catastrophes naturelles et humaines survenues en 2011, les dirigeants japonais ont décidé de maintenir le projet de candidature olympique. Cela signifie clairement que cette décision avait un but politique : normaliser la tragédie et la catastrophe. Le Comité international olympique (CIO) a entériné cette action du gouvernement japonais en désignant Tokyo pour les JO de 2020. Le départ de la flamme olympique de Fukushima est la preuve de cette entreprise. 

 

Pendant ce temps, des points de radiation élevée ont été découverts près du site olympique de Fukushima, confirmant que la zone n’est pas « rétablie ». Les JO eux-mêmes ont été un obstacle à la reconstruction réelle de Fukushima en absorbant toute la main-d’œuvre et les autres ressources. Le comité olympique japonais et les organisateurs utilisent Tokyo 2020 comme un moyen de verdir et de rendre présentable une tragédie nationale. La fin réelle de la contamination n’est pas pour demain et pour les habitants de Fukushima, cette bataille semble interminable et sans espoir. 

 

L’opposition du grand public aux JO était également présente à Rio en 2016, mais les Jeux ont eu lieu malgré le soulèvement populaire. Il est clair que le CIO, le gouvernement et les autres comités liés aux Jeux Olympiques ne se soucient pas de ce que veut le public. Des groupes anti-olympiques comme nous existent dans chaque ville hôte, et continuent de croître alors que les Jeux sont programmés à Paris et à Los Angeles. Malgré la pandémie, la machine olympique est allée de l’avant, déplaçant des populations précaires, rasant des logements et des parcs publics, mettant en place des nouvelles règles sécuritaires, détruisant des monuments culturels emblématiques, faisant de la publicité verte pour leur vision obsolète et engendrant une montagne de dettes publiques. Cela ne se produit pas seulement à Tokyo, mais dans toutes les villes hôtes.

 

Nous, les groupes anti-olympiques, anti-gentrification et anti-surveillance du monde entier, demandons l’extinction de la flamme olympique de Tokyo et ailleurs. Nous croyons que beaucoup d’autres choses, y compris la santé publique, méritent davantage notre attention qu’un spectacle aussi éphémère et mercantile.

 

Le 24 mars 2021

 

Hangorin No Kai No Olympics 2020

No 2020 Olympics Disaster OkotowaLink

Non aux JO 2024 à Paris

NOlympics LA

Anti Pyeongchang Olympics Alliance

Counter Olympics Network

Games Monitor

Extinction Rebellion Pantin et alentour

Avec ou sans coronavirus, il faut annuler les Jeux Olympiques

Au milieu d’une crise sanitaire majeure, le président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, et le premier ministre japonais, Shinzo Abe, se sont finalement mis d’accord sur le report des Jeux Olympiques de 2020 au 23 juillet 2021.

Cela étant dit, personne n’a la certitude que le CIO et le Comité d’organisation japonais puissent garantir d’assembler un puzzle aussi gigantesque que fragile d’ici un an. Il s’agit de 42 sites de compétition ; 33 Fédérations sportives internationales ; 206 Comités nationaux olympiques qui envoient 10,500 athlètes ; 3 milliards d’euros de sponsoring venant des 66 sponsors dits “locaux” (nommés “Partenaires Or des Jeux Olympiques de Tokyo 2020”, “Partenaires officiels …”, “Supporters officiels …” selon la somme qu’ils payent) ; 1,2 milliards de dollars de revenus publicitaires rien que pour la NBC ; 3,500 employés au Comité d’organisation dont 30% envoyés du gouvernement métropolitain de Tokyo ; 110,000 bénévoles ; 5 millions de billets déjà vendus par le Comité d’organisation ; 900 logements du futur-ancien village olympique déjà vendus ; 46,000 chambres d’hôtel réservées rien que par le Comité d’organisation pour la “famille olympique”. De plus, personne ne sait si cette pandémie ne sera résorbée dans un an. L’impact des conséquences économiques, financières et humaines est également très incertain.

ANNULATION PURE ET SIMPLE REFUSÉE

Aucune certitude. Après tant de sacrifices et tant de compromis, “nécessaires” selon Thomas Bach, pour surmonter tous ces cauchemars logistiques, il est possible que les “JO 2021” n’aient jamais lieu. C’est une perspective qui fait froid dans le dos, dont peu de gens osent parler, et pourtant ce risque est bien réel. Cependant le CIO et le gouvernement japonais ne peuvent pas choisir l’annulation. Pour l’un, la survie de son écosystème entier est en jeu. Pour l’autre, l’annulation pure et simple à quelques mois avant l’échéance pourrait entraîner une catastrophe économique. Le 6 mars, SMBC Nikko Securities a rendu publique son estimation pour le coût de l’annulation : 65 milliards d’euros (7,8 billions de yens). Selon certains médias occidentaux, ce qui est en question, c’est également l’héritage du premier ministre ayant été en poste le plus longtemps dans l’histoire du pays.

Commençons par l’écosystème olympique : l’argument favori de ses défenseurs, c’est que de l’argent récolté par le CIO va notamment aux “petits sports”. Autrement dit, certaines fédérations internationales de sports (FI) ne peuvent pas fonctionner sans l’argent “redistribué”, tous les quatre ans, par le CIO. Mais dans un monde ravagé par un virus ou pas, l’avenir de ces fédérations est l’une des dernières choses dont on se soucie. Quel serait l’incidence pour 99.9% d’êtres humains si ces FI fonctionnaient à l’avenir comme des fédérations de sports “non olympiques” – pétanque, boule lyonnaise, bowling ou rugby ? L’argument selon lequel la défense de toutes ces fédérations de sports olympiques serait d’intérêt général, est donc inopérant.

Ensuite, regardons l’impact économique pour le pays hôte. Il est vrai que l’annulation à quatre mois d’un tel événement ne peut pas laisser un pays, même s’il s’agit de la troisième puissance économique mondiale, indemne. Le report, ça coûte cher, mais moins que l’annulation. À partir de ce constat, il faut néanmoins se demander : en premier lieu, quelle nécessité y a-t-il à organiser un tel événement dont l’annulation au dernier moment pourrait carrément ruiner un pays comme le Japon ?

NUISANCES POUR LES PAYS HÔTES ET LOIS D’EXCEPTION

« Reporter les Jeux Olympiques, ce n’est pas comme décaler un match de football au samedi suivant », dit Thomas Bach. Il a raison. Les JO ne sont pas comme un match de football. S’il n’y a presque pas de critiques aguerries contre les matchs de football qui ont lieu tous les samedis, c’est parce que ces nuisances sont négligeables. On peut s’en foutre même si on n’aime pas le football.

Les nuisances des JO sont, elles, loin d’être négligeables. En fait, toutes les critiques contre ces Jeux anachroniques sont à chaque fois les mêmes depuis deux décennies. Des éléphants blancs. Privatisation du profit. Nationalisation des dettes. Expansion de la surveillance policière et militaire. Dégradation de l’environnement. Déplacement massif de populations. Tous ces maux n’auraient pas pu exister si les JO avaient été aussi restreints que les matchs de football. Toutes les difficultés liées au report ou l’annulation des JO sont les conséquences de la taille de cette “immense fête fraternelle”.

En vérité, le seul et unique but d’organiser des Jeux de cette taille pour un État, c’est d’imposer les inacceptables en temps normal. Notamment, l’accélération des travaux sans la contrainte juridique du temps habituel. Quand on lit la “loi olympique” française, il est clair qu’elle est là pour créer l’état d’exception. Ce n’est pas la “stratégie du choc”, mais la “stratégie de la festivité”. Ce n’est pas le “capitalisme du désastre”, mais le “capitalisme des fêtes”. La différence est seulement dans l’apparence : leur fonction est identique. C’est ainsi que la Société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO) peut construire le “village des médias” pour 4,000 journalistes dans une partie du parc Georges Valbon de la Courneuve classé en Natura 2000. C’est ainsi que l’État ajouterait des bretelles à l’échangeur de l’A 86 de Pleyel et supprime les bretelles de l’A1 à la Porte de Paris pour fluidifier le trafic entre le futur village olympique et le Stade de France, malgré l’opposition des riverains craignant pour la santé des enfants qui vont à l’école coincée par ces futures bretelles. Les recours en justice contre ces projets (qui comprennent aussi la construction de la Tour Triangle) ne bénéficieront que de l’examen de la Cour d’Appel (décision non suspensive) et sont privés de l’examen par la jurisdiction de première instance.

RETARD DANS LES CHANTIERS : UNE OPPORTUNITÉ POUR RENONCER ?

Les travaux pour Paris 2024 sont à l’arrêt en ce plein milieu de la pandémie, parce que ces travaux ne sont pas reconnus comme une des “premières nécessités” à l’instar de plein d’autres activités du capitalisme moderne. Personne ne sait quand la SOLIDEO pourra redémarrer les chantiers olympiques. Personne ne connaît l’impact qu’aura cet arrêt au calendrier de la livraison des ouvrages olympiques. D’ailleurs, la SOLIDEO n’a même pas encore lancé des grands chantiers comme le ledit village des médias ou le Centre Aquatique Olympique à quatres ans de l’ouverture des Jeux.

Mieux vaut ne jamais lancer ces chantiers. Mieux vaut suspendre les chantiers déjà lancés. On savait que les JO apportent systématiquement des dégâts sociétaux, environnementaux et économiques à chaque pays d’hôte. Maintenant, on connaît le coût en cas de report ou d’annulation de dernière minute aussi. L’estimation du coût supplémentaire dû le report pour les JO 2020 varie entre 2.4 milliards d’euros et 5.2 milliards d’euros, mais tous les analystes sont d’accord sur un point : ce sera payé par les contribuables. Certains diront : “Mais on n’aura pas une telle crise comme ça pour Paris 2024 ! Les Japonais sont exceptionnellement malchanceux !” Qui sait ? De plus, le sujet est tout autre. La vraie question est : sous quel prétexte peut-on imposer un tel risque en plus de ces nuisances prévisibles sans réellement consulter les habitants ?

Au Japon, pendant ce débat politico-sportif, nombreux sont ceux qui ont pris la peine de lire un texte aussi agréable que le contrat ville hôte pour les JO 2020. Ces lecteurs sont stupéfaits de son caractère unilatéral, notamment “I. Principes de base. 9 Indemnisation et renonciation aux recours contre le CIO”. En conséquence, certains réclament non seulement l’annulation des JO 2020 mais l’abolition du CIO et des Jeux Olympiques modernes (avec hashtag #廃止だ廃止). Il est important de préciser qu’une clause de cette nature n’existe pas dans le contrat ville hôte pour les JO 2024 de Paris, dans le contexte où de moins en moins de villes veulent organiser les jeux. Néanmoins, ce contrat reste, d’une manière peu équivoque, très favorable au CIO.

Mais n’importe quel contrat est résiliable. Les JO 2024 n’ont pas commencé la plupart des travaux. Le Comité d’organisation des jeux olympiques (COJO) français peine toujours pour trouver des sponsors. Les billets ne sont pas vendus. Le calendrier du Parc des Expositions (qui accueille le Centre Principale des Médias) est encore flexible. Les chambres d’hôtels ne sont pas encore réservées. A ce stade, l’annulation des JO 2024 n’est pas seulement faisable, mais ô combien nécessaire pour un pays fragilisé par la pandémie ! Les JO n’étaient jamais et ne seront jamais parmi les premières nécessités, avec ou sans coronavirus ! D’ailleurs, avec l’arrêt des activités économiques officiellement reconnues “sans nécessité”, force est de constater que le coronavirus est plutôt bon pour l’écologie de cette planète. Baisse drastique des émissions de CO2 sera confirmée dans quelques mois. N’est-ce pas une insulte pour notre écologie de ne pas annuler un événement aussi inutile et écocide que les JO dans le monde d’après le coronavirus ?

Sans attendre un autre virus ou un autre épisode apocalyptique, il faut annuler ces Jeux. Plus tôt cela sera fait, plus facile et moins coûteux ce sera. Si la France annule les JO 2024, le CIO disparaîtra très probablement. Mais cela ne voudra absolument pas dire la fin du sport ou des sports. Cela sonnera simplement la fin de ce cérémonial grandiloquent bricolé à partir de fantasmes sur l’Antiquité grecque. Il y aura forcément quelques-uns pour pleurer sa disparition malgré sa valeur douteuse. Nous préférons garder nos larmes pour la disparition des choses bien plus précieuses.